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La revalorisation des enseignants en France est-elle encore possible d'ici 2027 ?


Le 07.01.2025 puis le 14.01.2025, le Canard Enchaîné dévoilait le montant du coût du changement du fauteuil du Président du Sénat, Gérard LARCHER: 40.000,00€ TTC.

 

Peu après, Gérard LARCHER a indiqué que le changement du fauteuil et un prototype coûtaient non pas 40.000,00 € mais 34.000,00 € Hors taxes, soit 40.000,00 € TTC.

 

A l'heure où l'Etat est endetté à plus de 112% de son PIB avec plus de 3.200 milliards d'euros, c'est assez étonnant qu'il n'y ait pas eu plus de réflexion, au moment où les parlementaires exigent des efforts des français (augmentation des impôts, nouvelles taxes, décarbonation en changeant sa voiture thermique pour une électrique, etc), sur le ressenti qu'auraient les citoyens si le coût du fauteuil fuitait... ce qui se produisit.

 

34.000,00 € le fauteuil et son prototype, c'est 4 à 5 fois plus cher que n'importe quel fauteuil luxueux des époques Louis XIV, Louis XV ou Louis XVI en vente aux enchères.

 

C'est plus que le salaire moyen annuel d'un professeur des écoles ou d'un professeur certifié. Le site "emploipublic" indiquait le 17.08.2022 que le salaire moyen d'un professeur en France était de 2.695,00 € nets par mois à temps complet contre 2.008,00 €nets à temps partiel ou à temps incomplet.

 

Comme les professeurs des écoles ont la même échelle indiciaire que les professeurs certifiés, un professeur coûte donc en moyenne moins qu'un changement de fauteuil du Président du Sénat.

 

Il se trouve que les parlementaires sont plus préoccupés part les dépenses qui les concernent que par la revalorisation des professeurs, puisqu'ils n'ont pas hésité, puisqu'ils le décident eux mêmes, à augmenter le 24.01.2024 de plus de 300,00 €/mois leur avance de frais de mandat, la portant à 5.950,00 € par mois, ce qui n'est pas négligeable complètement déconnecté du salaire moyen des français (qui est de 2.630,00 € nets public/privé en 2022 selon l'INSEE). Le 16.11.2023, les sénateurs s'étaient votés une augmentation de 700,00 €/mois de cette avance en le passant de 5.900 €/mois à  6.600,00 €/mois, à contre-courant des efforts exigés des français.

 

La nouvelle ministre de l'Education nationale va donc avoir du mal à expliquer qu'on puisse financer au niveau de l'Assemblée nationale et du Sénat au titre de l'inflation, de telles sommes, sans penser aussi à la revalorisation de ceux dont le pouvoir d'achat ne cesse de se dégrader depuis 45 ans, avec une perte de 50%de pouvoir d'achat de la génération de professeurs partant en retraite actuellement.

 

Mais en acceptant après une négociation apparemment âpre, de ne pas supprimer 4.000 postes d'enseignants dans le budget 2025, c'est 4.000 x 32.000,00 € soit 128 millions d'euros qui ont été consacrés à satisfaire les syndicats.

 

Va-t-il rester quelque chose pour revaloriser les professeurs ?

 

Il semble que ce soit encore pour les calendes grecques, car en augmentant sans cesse la masse salariale de l'Education nationale, il est difficile d'espérer de la part de l'Etat un rattrapage des 16% d'inflation cumulés depuis 3 ans.

 

Les professeurs perdent de l'argent tous les ans, et sur toute une carrière, c'est énorme. La génération qui a enseigné du milieu des années 1980 au milieu des années 2020 a perdu 50% de son pouvoir d'achat. C'est juste énorme. Cela explique le déclassement du métier de professeur au sein des cadres, en en faisant des "cadres moyens", alors que leur Master2 les auraient placés ipso facto dans le privé parmi les cadres supérieurs.

 

Depuis les PPCR, les professeurs ont certes obtenu des augmentations indiciaires sur la durée de leur carrière, mais ils n'ont pas été traités à égalité.

 

Les professeurs agrégés ont été nettement augmentés que les professeurs des écoles et les professeurs certifiés.

 

Lors des PPCR en 2016 a été créée une classe exceptionnelle pour les professeurs des écoles (PE) et les professeurs certifiés (PC), leur permettant d'obtenir jusqu'à l'indice 972 (sommet de la hors-classe des agrégés) alors qu'ils terminaient leur carrière en hors-classe à 783 jusque là. Le sommet de la hors classe des PE et des PC a été porté de 783 à 821 (sommet de la classe normale des agrégés en 2016).

 

- Les PE et PC ont donc gagné 17 + 21 = 34 points d'indice en Hors Classe et 151 points d'indice de plus, pour la classe exceptionnelle, qui n'existait pas.

 

- Les professeurs agrégés (PA), eux, ont vu leur fin de hors classe passer de 967 à 972, soit 5 points d'indice de plus seulement. Leur classe exceptionnelle a été portée à 1068, soit 28 + 68 = 96 points d'indice de plus, soit 55 points d'indice de moins en valeur absolue que les PE et les PC. 

 

L'écart de rémunération des PA s'est donc resserré avec ceux des PE et des PA, tout comme le différentiel des rémunérations des PE, PC et PA s'est resserré par la suite avec la revalorisation de Jean-Michel BLANQUER pour les professeurs de moins de 20 ans d'ancienneté.

 

Les revalorisations des professeurs ont eu pour effet d'allonger le temps de la carrière en classe normale en supprimant les "grand choix", "petit  choix", "ancienneté", possibilités d'avancer plus vite, au profit d'un gain mineur de 2 ans (réduction de l'ancienneté d'échelon possible de 1 an au 6e et au 8e échelons, au bon vouloir de l'inspecteur après son rendez-vous de carrière) durant l'échelle indiciaire de chaque corps. Au lieu de passer a minima 20 ans dans son échelle indiciaire et a maxima 26 ans avant la réforme des PPCR, le passage dans les échelles indiciaires est a minima de 24 ans maintenant, et de 26 ans pour ceux qui avancent à l'ancienneté.

 

Toutefois, c'est sans compter le temps de stagnation, une fois arrivé au 11e échelon de la classe normale, du professeur, le temps qu'on lui accorde la Hors-Classe. Il peut se passer 1 à 10 ans en fin de classe normale avant d'obtenir le passage à la Hors-Classe, et 1 à 10 ans en fin de Hors-Classe avant d'obtenir le passage à la Classe-Exceptionnelle.

 

Un professeur très bien considéré par son IEN ou son IA-IPR peut espérer stagner à peine 2 ans en fin de classe normale pour passer à la hors classe, puis en fin de hors classe pour passer à la classe exceptionnelle, et réduire ainsi sa progression totale à 35,5 ans (avant de voir son salaire indiciare stagner jusqu'à son départ en retraite) tandis qu'un professeur peu considéré par son IEN ou son IA-IPR (car le plus fréquent), mettra 2 ans de plus en classe normale (soit 26 ans), pourra stagner jusqu'à 10 ans de plus au 11e échelon de sa classe normale avant d'obtenir sa hors classe, et ne parviendra en fin de carrière qu'au sommet de sa hors-classe (8,5 ans de plus), puisqu'il stagnera ensuite sans atteindre la classe exceptionnelle.

 

La stratégie de l'administration pour lui faire repousser son départ en retraite, sera de lui proposer l'accès à la classe exceptionnelle entre sa 40e et sa 43e année de telle manière qu'il ait envie d'aller jusqu'au bout de la classe exceptionnelle, jusqu'à 43 à 46 ans d''activité.

 

Cela explique qu'au plus 10% des professeurs atteindra la Classe-Exceptionnelle, les PPCR ayant en théorie garanti que tout professeur réaliserait sa carrière sur "deux grades", à savoir la Classe Normale et la Hors-Classe.

 

Les professeurs agrégés, censés représenter l'élite des professeurs, ont donc beaucoup perdu au change, puisque s'ils avaient été aussi bien traités que les PE et les PC, ils auraient obtenu une Hors-Classe portée à 967 + 34 = 1.001 points et une Classe Exceptionnelle portée de à 1.152 points (1.001 + 151 points accordés aux seuls PE et PC).

 

EN SAVOIR PLUS

 

CHUTE DU POUVOIR D'ACHAT DES PROFS

 


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