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Le 14 février 2025 cette professeur de maths en disponibilité ne parvenait pas à réintégrer, alors que l'Education nationale dit manquer de professeurs de maths


Ce qui pénalise l'Education nationale, c'est sa bureaucratie qui occupe de plus en plus de place, puisque sur 1.400.000 agents, les professeurs n'en constituent que 61,9%. Régulièrement des professeurs nous font part de l'inertie terrible de ce système qui manque de réactivité.

 

Julie EYSSAUTIER nous informe le 14 février 2025 qu'elle est professeur de Mathématiques en disponibilité d'office (l'administration lui ayant imposé cette option après lui avoir refusé un CLM) dans l'académie de Grenoble, et qu'elle a dû choisir cette option pour accompagner son conjoint en fin de vie, touché par la maladie de Charcot dont il est décédé le 30 octobre 2024.

 

En septembre 2024, sous la pression des services académiques qui exigeaient une décision rapide de sa part, ne tenant aucunement compte de la situation terrible qu'elle vivait au chevet de son conjoint, elle avait demandé le renouvellement de sa disponibilité pour 3 mois puisque son conjoint était encore en vie et avait besoin d'elle à 100%. L'administration n'a jamais répondu à sa demande.

 

 

En janvier 2025 Julie demande sa réintégration dans son établissement et son ancien directeur, qui manquait de professeur de mathématiques, avait soutenu sa demande. Son médecin traitant lui a fait une attestation d'aptitude à reprendre ses fonctions.

 

Et qu'a fait la commission médicale académique au vu de ces nouveaux éléments ? Elle a ignoré sa demande en repoussant sa disponibilité jusqu'à mai 2025, sans se soucier de ses problèmes financiers pour arriver à vivre. Cela montre toute l'inhumanité des services académiques, même prenant des décisions envers les agents dans des situations terribles, lorsqu'on les sollicite dans un premier temps.

 

Julie voulait revenir enseigner les mathématiques, puisque l'Education nationale manque de professeurs de mathématiques. Contactant son Rectorat, ils lui ont refusé ce droit dans un premier temps, comptant certainement sur son isolement.

 

Malgré un certificat de son aptitude à réenseigner, son académie la maintenait en disponibilité forcée, avec seulement 630,00 € par mois pour vivre et élever ses enfants.

 

Combative malgré toutes ces épreuves, a dans un premier temps lancé un appel sur Facebook, le 14 février 2025 qui a reçu 123 messages de soutiens de professeurs et de proches, tous écoeurés que la réponse de l'administration en pareil cas puisse être cette ignorance, cette froideur, ce manque d'écoute, d'empathie. Cette publication sur Facebook est peu à peu remarquée par tous ceux en mesure de l'aider.

 

Ensuite, c'est un vrai combat que conduit Julie EYSSAUTIER pour obtenir le droit de revenir enseigner les mathématiques, elle qui n'avait aucune intention de quitter son métier.

 

En pleine perte d'attractivité du métier d'enseignant, c'est effarant de constater la lenteur des autorités académiques à réagir.

 

Le 20 février, nous écrivons sur le fil Linkedin de Jannick CHRETIEN, Secrétaire Générale de l'Académie de Grenoble, pour attirer son attention sur cette situation. Cette Secrétaire Générale ne nous répondra pas, ce qui eut été le minimum lorsque l'on agit dans le domaine des Ressources Humaines d'une grande académie comme Grenoble. Cette personne pourtant publiait cette semaine-là qu'elle était une "'femme de dialogue, son quotidien", et son absence de réponse nous en a alors fait sérieusement douter.

 

Le même jour à 16h23 le média "Actu.fr" (Lisa RODRIGUES) publie un article sur la situation ubuesque de Julie EYSSAUTIER : la "vague médiatique" démarre.

 

Ce n'est en effet que de cette manière que les académies se mettent à bouger: quand les médias en sont informés. Sinon, c'est la politique de la porte fermée, l'administration toute puissante laisse l'individu dans l'absence de réponse, espérant qu'il va se décourager.

 

Mais Julie est combative, elle sait qu'elle veut revenir enseigner les mathématiques, car elle aime enseigner. C'est devenu si rare, un professeur passionné de son métier en 2025 !

 

Dans cet article d'Actu.fr le rectorat de Grenoble contacté par la journaliste dit "être très touchés par cette situation" et "qu'une attention académique forte est portée à Madame EYSSAUTIER afin de lui apporter tout le soutien administratif et social nécessaires, et trouver le plus rapidement possible une issue favorable à cette situation".

 

Note ces mots : "attention académique forte" et éle plus rapidement possible", c'est très important à ce stade.

 

Le 21 février, nous adressons un mail par Linkedin à la Ministre de l'Education Elisabeth BORNE, qui ne répondra pas. Nous l'interpellons sur son fil Linkedin, toujours aucune réaction. Allait-elle se détourner de cette problématique en tournant le dos comme à Mayotte à ces deux professeurs qui voulaient lui parler ?

 

Le soir du 20 février, Julie EYSSAUTIER nous informe qu'elle vient de recevoir ce mail du Rectorat de Grenoble:

"Madame EYSSAUTIER,

Vous êtes actuellement placée en disponibilité d'office jusqu'au 25 mai prochain. C'est une décision du comité médical, que vous avez sollicité à un moment particulier. Nous comprenons que vous souhaitiez désormais modifier cette décision, mais nous ne sommes pas médecins et le rectorat n'a pas le pouvoir d'annuler une décision du comité médical.

Comme nous vous l'avons indiqué, ainsi qu'à votre établissement, vous devez à nouveau saisir le comité médical si vous souhaitez reprendre plus tôt, le comité médical étant le seul à pouvoir revenir sur sa propre décision. Il n'est pas possible de déroger à cette procédure.

Nous évoquerons aujourd’hui votre situation avec le SAPAMH pour alerter sur l'urgence de votre situation, mais vous devez saisir vous-même sans tarder le comité médical (ce.sapamh@ac-grenoble.fr) en résumant votre situation dans votre mail pour qu'il annule le plus rapidement possible sa décision antérieure.

Nous ne pouvons annuler nous-mêmes la décision du comité médical, à moins que celui-ci ne nous indique le contraire, ce que nous ne manquerons pas de faire immédiatement. Nous prenons contact avec le service concerné pour instructions.

Cordialement,"

 

Aussitôt Julie saisit à nouveau la commission comme suggéré dans le mail académique.

 

Le fait qu'il n'y ait que 78 médecins du travail en 2025, soit entre 2 et 3 par académie, 1 pour 11.115 professeurs au niveau national, n'est certainement pas étranger à cette inertie académique ce manque de réactivité en pareille situation, avec des services inefficaces puisque tous paralysés dans leur action par un manque de personnels, de moyens. Le budget annuel de l'Education nationale, qui ne cesse d'augmenter, est pourtant de 27,4 milliards d'euros pour le 1er degré et 39,4 milliards d'euros pour le 2nd degré en 2025, soit 66,8 milliards d'euros, donc 3,8 milliards de plus qu'en 2024.

 

Le 20 février à 19h28, Le Dauphiné Libéré se saisit lui aussi de cette affaire, et publie un article pour soutenir la demande de Julie EYSSAUTIER.

 

Depuis le 14 février 2025 que Julie EYSSAUTIER nous a sollicités, nous lui soutenons le moral en tentant de lui expliquer cette lenteur administrative, sans pour autant la légitimer. L'Education nationale a les moyens d'être plus réactive, alors que Boris MELMOUX-EUDE se félicite depuis 18 mois de la "Révolution RH" qu'il pilote en visitant une à une les équipes RH de chacune des 30 académies (il en est environ à 20 académies visitées).

 

Le 6 mars 2025 nous demandons à Julie où en sont les choses. 3 semaines se sont écoulées, déjà... et quand on n'a pas de salaire, qu'on attend une décision "d'une attention forte" et "le plus rapidement possible", 3 semaines, 21 jours, c'est très, très long.

 

Le mardi 11 mars 2025 a eu lieu une Commission Médicale au Rectorat de Grenoble pour statuer entre autres sur sa situation, car il y a bon nombre de situations problématiques dans toutes les académies.

 

Samedi 15 mars 2025 Julie EYSSAUTIER nous annonce la bonne nouvelle: elle est réintégrée sur son poste en Mathématiques dans son établissement d'origine ! La personne qui la remplaçait ayant fait savoir qu'elle voulait arrêter (c'était une professeur à la retraite revenue enseigner).

 

Bilan de tout cela ?

 

Entre la demande de réenseigner de Julie EYSSAUTIER et sa réintégration effective, il s'est donc passé 2,5 mois ! Alors que le Ministère de l'Education nationale, l'Etat, investit des dizaines de millions d'euros dans une Révolution RH, est-ce tolérable de tels délais, si lents ?

 

A quand une médecine du travail digne de ce nom dans l'Education nationale, avec nettement plus de médecins du Travail, des commissions médicales plus fréquentes ?

 

Julie EYSSAUTIER n'est pas le seul cas, elle n'est qu'un arbre qui cache la forêt de tous ces professeurs qui attendent la décision de leur CLM ou de leur CLD depuis 6 à 12 mois et placés en insécurité financière avec un salaire de mi-temps (nous avons eu cette année un cas dans une académie du Sud de la France, qui a mis 8 mois pour que la CMS statue sur une demande de CLM formulée en juillet 2024 !).

 

Est-ce la bureaucratie qui est trop lourde, avec 39% des effectifs, qui augmentent sans cesse ?

 

François BAYROU Premier Ministre dit chercher des économies. Il faudrait qu'il commence par demander un audit de l'optimisation des effectifs RH dans toutes les académies, et lance un remaniement des procédures dans toutes les académies pour les conduite à une plus grande réactivité.

 

Depuis 19 ans, au niveau d'AIDE AUX PROFS, et même depuis la mise en place de la GRH de proximité par Jean-Michel BLANQUER depuis 2019, nous n'avons que de mauvais échos des professeurs gérés par l'Académie de Grenoble.

 

Une académie-prison qui refuse la quasi totalité des demandes des professeurs qui veulent la quitter pour détachement, disponibilité, rupture conventionnelle démission.

 

Janvier 31 jours + Février 28 jours + Mars 13 jours jusqu'à la Commission Médicale = 72 jours de réactivité.

 

"Le plus rapidement possible", c'est donc 72 jours pour l'académie de Grenoble.

 

20.02.2025: Actu.fr à 16h23

 

20.02.2025: Le Dauphiné Libéré à 19h28

 

18.03.2025: Le Dauphiné Libéré annonce à 11h04 sa réintégration

 




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